Salut, c'est Thierry Spencer.
Mais tu commences à me connaitre.
Tu connais mon humeur, mes coups de griffe, mes coups de sang, mes coups de gueule. Pourtant ce soir j'ai décidé de ne pas boire. Ce soir j'ai décidé d'éteindre la lumière et de laisser vagabonder mon âme dans le noir.
Je ne veux plus voir cette tronche qui se décompose et ses yeux terreux où se miroite le reflet d'un cadavre moisi par l'alcool.
Je sens mes mains qui se crispent sur mes cuisses. J'ai le front en sueur. Des larmes coulent de mes yeux. C'est bon. Je n'avais plus pleuré depuis des décennies. Ce soir, j'ai l'impression d'être redevenu le jeune homme que je n'aurais jamais du cessé d'être. Dans les ténèbres, on se sent mieux. On ne triche plus avec soi-même. Je me retrouve au temps où j'étais un petit garçon, doux et sensible, aux cheveux frisés. Je me revois jouant à des jeux innocents, faisant voler des avions de papier et jouant aux billes dans la cour de mon école. Il aura pourtant fallu grandir, devenir un homme, comme on dit. Le temps des premières amours, premières joies, premières déceptions aussi. Des rêves brisés. Un cur fendu en deux. Alors je me suis à boire pour oublier. Au début je voulais m'arrêter mais c'est vite un engrenage. A cela s'ajoute le plaisir. Le plaisir de combler l'ennui.
Car je m'ennuie dans ce monde à la con. De voir ces mêmes visages. Et la routine qui revient sans cesse. Je me déteste. Je déteste cette vie. Et je voudrais en finir. Retrouver l'autre rive où mes cauchemars cesseront de me hanter.
C'est pourquoi je bois. C'est pourquoi je me détruis. Pour fuir cette réalité devenue moribonde. Je ferme les yeux. Je ne pense plus à rien. J'attends. Mes larmes ont fini de couler. J'ai comme un goût amer dans la bouche et mes lèvres sont sèches.
Je vais dormir. Ce soir je n'ai plus rien à dire. Plus rien à ajouter.
A bientôt, mon pote. Si je suis encore vivant.
Tchao.
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